How do you run frome what's inside your head ? ( Ékatérina )

Tout n’était que cacophonie, excès, éclats de rire, dans le pub dont Charlie avait poussé la porte. Il s’était refusé à boire au même endroit que là où il travaillait. Question d’éthique, disait-il. Besoin furieux de changer de décor, surtout. Les trois balais étaient trop gentillet. Le Chaudron Baveur, trop ennuyeux. Ne restaient que ces endroits que le commun fuyait, ces lieux de perdition destinés à ceux qui ne trouvaient pas leur place ailleurs. Charlie s’était irrésistiblement senti attiré par l’enseigne battue par les vents du Red Crimson. Il connaissait la réputation des lieux, mais s’en moquait éperdument. Il avait toujours aimé jouer avec le feu, Charlie. Et puisque son existence était devenue d’une banalité déprimante, il lui fallait trouver des alternatives. Faire n’importe quoi, juste pour se sentir revivre un peu. Ainsi était-il là, Charlie. Un verre entamé à la main. Une bouteille presque vide sur un coin de la table qu’il occupait. Seul, à peine dérangé par les regards curieux de ceux qui devinaient sans peine à qui cette chevelure rousse appartenait. Il trinquait pour lui même, et pour ceux qui ne s’étaient pas relevés. Il buvait à un monde meilleur, où égoïste, il se voyait embrasser à nouveau son métier d’avant. Il espérait un miracle auquel lui-même ne croyait plus. Il buvait aussi pour ça. Pour oublier l’amère déception d’avoir dû tirer un trait sur ses rêves broyés. Charlie n’était qu’un homme en peine, une enveloppe vidée de tout contenu, et qui n’avait pas le droit de se plaindre. Comment l’aurait-il pu, quand George pleurait une partie de son être ? Quand Ron s’était vu dépossédé de tout ce qui comptait pour lui ? Ils semblaient bien fades, les malheures de Charlie, en comparaison. Mais dans ces instants qu’il se réservait pour lui seul, il pouvait laisser parler sa mélancolie sans craindre de se sentir coupable. A grands coups d’alcool et de pensées sombres.
Un énième verre achevé. Il avait cessé de les compter. Il n’était plus tellement en état de le faire non plus. Une main sur la table pour prendre appui, il se relève, titubant. Il voit la salle tourner autour de lui. Les yeux clos l’espace d’un instant, pour retrouver son équilibre. Il balance quelques mornilles sur la table, en guise maigre pourboire, et s’en va sans demander son rêve. Une fois dehors, l’air frais le réveille un peu. Juste assez pour s’éloigner des lieux. Il s’avance vers Diagon Alley, et doucement, quitte les ténèbres qui entourent l’allée des embrumes. La lumière des lampadaires l’éblouie un peu, juste assez pour qu’il distingue un banc sur lequel s’étaler sans panache. Il est venu en transplanant, Charlie. Et n’est clairement pas en état de recommencer, désormais. Qui sait où il pourrait bien atterrir, dans un état pareil ? Alors, un peu perdu dans les brumes opaques de son esprit alcoolisé, il s’allonge sur le banc, les jambes recroquevillées, les yeux clos. Et déjà, emporté par la fée verte, il ronfle doucement.